• Une semaine que j'attends......
    Raphaël a voulu que nous jouions à "Pounci"..... pounci du plaisir..... pounci de mon plaisir..... une semaine.....  
    chaque soir, il me regarde d'une manière telle que je me dis.... ça y est ! c'est fini ! je lui souris, me fait chatte sous son regard, et espère..... mais non. pas encore. pourquoi c'est toujours lorsque l'on est privé de quelque chose que l'on en ressent si fort le besoin?  
     
    ce soir..... ce regard.... je décide de faire mine de ne rien voir.... je vais et je viens, comme si je n'espérais plus. son air se fait moqueur.... je le hais. je l'adore. j'ai envie de lui.....
     
    je suis en train d'étendre les draps sur notre lit.... lorsque son corps se serre contre le mien. une onde d'envie traverse tout mon corps, de bas en haut.... s'attardant dans mon ventre.... je gémis doucement.... ses doigts s'amusent avec mes seins, quelques secondes... fugitives.....  
     
    le téléphone sonne. contre ma nuque, je sens les lèvres de Raphaël qui se crispent.... et un soupir déçu envoie voler quelques mèches de mes cheveux contre ma joue..... je ferme les yeux, pour faire taire l'envie.... l'envie de lui....
     
    C'est Mathilde. je détourne le visage, et fais un pas vers la porte, pour m'éclipser.... en une seconde, je ne suis plus à ma place..... en une seconde.
     
    Lorsque j'arrive à l'entrebâillement de la porte, je sens le bras de Raphaël contre ma peau me retenir. j'essaie de me dégager..... mais son regard sur moi se fait tendre..... et je suis incapable de ne pas lui céder. je reste, mais pour rien. je reste pour rien.....
     
    j'entends sa voix, à elle, métallique à cause de la distance qui me sépare du combiné..... sa voix semble égale d'un mot à un autre.
     
    C'est Mathilde. Sa Femme.
     
    "je sais Matou......
     
    "calme toi, Matou,  juste une seconde......"
     
    la voix est pourtant toujours égale, d'une phrase à l'autre.... je fixe le couloir..... le petit bout de couloir, qui dépasse dans l'entrebâillement de la porte.... je voudrais quitter cette chambre, Maintenant. disparaître et ne revenir que lorsque j'aurai ma place à moi, dans sa chaleur.  
     
    de la main, Raphaël me fait signe de m'approcher. pourquoi? je ne veux pas qu'il joue avec moi alors que Mathilde distille des mots que je n'entends pas, dans son esprit.....
     
    il insiste.... je m'approche. sans bruit, il prend mes doigts entre ses doigts, et glisse le téléphone dans ma main.... je le garde éloigné de moi.... je fixe le regard de Raphaël, sans comprendre.... j'ai l'impression que le téléphone pourrait brûler ma peau. j'ai l'impression que Mathilde pourrait brûler Notre âme.
     
    un signe de la main. il veut que je raccroche. alors que la voix continue de métalliser notre tiédeur.... je perçois quelques mots....  
     
    "tu es un irresponsable. tout ne s'arrange pas toujours. tu n'es pas au dessus des autres, Raph. la vie se vengera si tu continues de la toiser....."
     
    un silence..... comme si Mathilde avait compris qu'il ne l'écoute déjà plus.
     
    "tu m'entends? Raph, tu m'entends?"
     
    moi, en tout cas, je ne veux plus l'entendre..... les yeux fixés sur les doigts de mon Maître, qui m'intiment l'ordre de raccrocher le combiné, je pose doucement l'appareil à sa place. un clac, et la voix se tait..... c'est bon qu'elle se taise..... c'est si bon..... je retrouve mon oxygène.....
     
    Raphaël laisse passer quelques secondes, puis, les yeux dans les miens, décroche à nouveau le téléphone, et le pose sur la tablette. pour qu'il ne sonne plus. je lui souris..... je ne suis pas certaine d'en avoir le droit, mais une tendresse inconnue est en train de m'envahir.
    La voix métallique, normalement, me rend nerveuse.... parfois un peu haineuse..... parfois exaspérée.... parfois malheureuse.... ce soir, je ne sais pas pourquoi, mais tout mon être semble n'être que tendresse..... malgré Elle.... ou peut-être, étrangement, grâce à elle.... je ne me l'explique pas.
     
    Raphaël paraît surpris par ce petit sourire sur mes lèvres.... je sens bien qu'il ne sait pas comment réagir.  
    C'est pourtant facile..... Raphaël, c'est si simple..... sois mon Maître.  
     
    il passe une main sur mon visage. son "doute" s'efface, tout doucement, dans le noir de mes yeux..... et laisse place l'expression que je connais si bien.
     
    " Tu montes Nina."
     
    je lui souris. c'est plus fort que moi..... l'envie est revenue, décuplée par la voix métallique de Mathilde. c'est nouveau......une sensation que je ne connaissais pas..... c'est......odieux, immoral, et pervers..... je voudrais, je voudrais tellement me détester de ressentir ça...... mais j'ai beau essayer, je n'y arrive pas.....  
    un mot danse dans ma tête: Victoire.  
    ça devrait être interdit de penser des choses aussi infâmes.....
     
    je monte jusqu'à Notre pièce, et retire rapidement mes vêtements..... je m'agenoue au centre de la pièce.... et garde les yeux baissés lorsqu'il s'approche de moi..... est-ce que c'est humain d'avoir autant envie de lui? est-ce que c'est possible?  
     
    il dérange mes cheveux du bout des ongles, et s'éloigne vers le coin de la pièce..... j'entends qu'il tire doucement la table à côté de moi..... je ferme les yeux de désir.
     
    il déroule une rallonge, qui tombe mollement sur le sol.... j'ai envie de regarder, mais je me retiens.... je fixe le sol, devant mes genoux, en essayant de calmer ma respiration, qui s'affole plus encore de désir que de peur.....
     
    j'entends un bruit électrique dont l'intensité augmente progressivement, puis se tait..... comme les néons colorés qui ornent l'extérieur des hôtels bon-marché.....
     
    "lève toi ma Nine".
    j'obéis, glisse un regard vers la table..... une ampoule nue, jaune, est posée en son centre, au creux d'un bougeoir qui n'en laisse dépasser qu'un petit morceau orphelin de lumière crue.
    la rallonge court sur la table, et se perd vers le mur......
    un morceau de tissu pâle recouvre l'ampoule......
    je jette un regard interrogateur à Raphaël. il tient entre ses bras une couverture claire et......il arbore une mine ravie.....  
     
    il pose la couverture, pliée en six, devant l'ampoule, sur la table.....
     
    "viens ma belle."
     
    je m'approche de la table, sans bien comprendre quel sera notre jeu......
     
    lorsqu'il m'aide à m'allonger sur la table, mon ventre frôle l'ampoule, et je pousse un petit cri de surprise..... elle est brûlante..... je jette un regard effrayé à mon Maître, et me recule, posant mes fesses sur mes chevilles.
     
    la douceur de ses gestes aura raison de toutes mes craintes...... en quelques secondes, me voilà sur la table, le ventre posé sur la couverture, les seins offert, sur le bois, et les jambes crispées, à moitié repliées, pour protéger mon intimité de la brûlure de l'ampoule.
    la position est inconfortable, j'essaie de descendre un peu ma taille, pour tester jusqu'où est ce que je peux aller, sans me brûler. lorsque je sens, à la base de mes lèvres, la chaleur rougir ma peau, je me relève légèrement, mes fesses s'offrant insolemment sous les yeux de mon Maître.
     
    Raphaël reste de longues minutes debout à côté de moi, comme s'il admirait son oeuvre..... je danse doucement d'un genou sur l'autre, pour essayer de tenir..... puis finis par parvenir à rester immobile..... en rentrant, seconde après seconde, de plus en plus profond en moi-même.
     
    Mon Maître paraît ravi que je sois capable de perdre mon regard sur ses doigts, qui cajolent les miens, sans manifester la moindre crainte.....
     
    il s'éloigne, et, lorsqu'il revient, il saisit doucement mes seins entre ses doigts, et, sans un mot, clippe les deux petites pinces métalliques sur mes tétons. je ne peux m'empêcher de gémir, la douleur irradie ma poitrine, puis se propage jusque dans mon bas ventre. Mon bassin ondule doucement, pour supporter la douleur, et je sens la chaleur de la lampe se rappeler à mon souvenir, à la base de mes cuisses. je resterai donc immobile, puisque c'est le seul choix qui m'est donné.
     
    Sans un mot, Raphaël se déshabille.... son corps, que je chéris chaque seconde plus fort, me paraît à présent si connu par mon esprit, que je crois que je pourrais le dessiner, du bout des ongles, même les yeux fermés......  
    je caresse sa peau nue du regard, embrasse le pli de ses coudes en moi-même..... pourquoi est-ce si souvent cet endroit précis de son corps que j'ai envie d'embrasser en premier?  
    lorsqu'il s'approche de moi, l'envie, la même envie que pendant cette longue semaine de privation, la même envie que lorsque la voix métallique s'est tue, fait trembler la peau de mon ventre...... mélange d'une tendresse que je ne suis pas capable d'expliquer, humaine, profondément humaine, et d'un besoin..... presque animal.... presque vital..... qu'il me fasse l'amour.....
     
    je sens la base de mes lèvres trembler d'envie..... je sens les muscles de mes jambes faiblir.....
    la brûlure de l'ampoule est si proche de ma peau...... la douleur commence à être palpable...... elle me soulage...... elle me rend l'oxygène que la voix métallique m'a volé.....
     
    Raphaël présente son sexe devant ma bouche, et je le prends en moi...... je sens son plaisir monter en lui, aussi vite que mon envie.....
    mon envie de lui donner tout le plaisir qu'il mérite est corrompue un instant, par la douleur..... car , comme s'il sentait que tout était donné trop facilement, Raphaël tire sur les pinces qui meurtrissent la peau de mes seins, les fait tourner entre ses doigts.....
    son sexe dans ma gorge étouffe mes gémissements de douleur.....
     
    j'ai besoin qu'il me fasse l'amour...... j'en ai tellement besoin..... lorsque l'ampoule brûlante se pose pour du bon sur la peau fine de mon intimité, tout mon corps s'affole de douleur...... j'ai envie de crier, mais Raphaël maintient mes lèvres autour de son sexe..... il me suffirait juste de tendre les muscles de mes jambes..... juste ça..... pour que la brûlure cesse..... mais..... je ne peux plus..... je suis allée trop loin..... je brûlerai, tant qu'il ne m'aura pas prise...... je brûlerai, tant que je ne serai pas à lui...... corps et âme.....  
     
    au moment où Raphaël retire doucement son sexe de ma gorge, la douleur devient insupportable..... comme s'il pouvait exister un seuil de non retour.....
     
    je pousse un petit cri étouffé, et me redresse..... mes seins rebondissent souplement, et l'une des pinces se déclippe.
     
    Raphaël sourit.....
    "tu n'as pas pu t'en empêcher, pas vrai?"
     
    je halète de douleur, retrouvant mon souffle contre le bois de la table.....
     
    "t'es vraiment une petite chienne."
     
    pour la forme, je lui jette un regard de reproche...... mais.... il a tellement raison..... je deviens Animale, quand il s'agit de lui, je le désire tellement que je ne pense plus humainement..... je perds toute notion de bien et de mal, je perds tous mes repères..... je perds Tout, et il ne me reste que lui.
     
    sans bruit, il me repousse vers la table...... la douleur de la brûlure fait encore trembler la peau de tout mon corps, et pourtant, lorsque son sexe se présente entre mes cuisses, un long gémissement de plaisir s'échappe de ma gorge.....  
    je love mon visage juste au creux de son épaule, et déguste chaque va et viens de son sexe en moi, comme un cadeau du ciel..... il me semble que nous avons joui exactement au même moment.....  comme si nos deux corps n'était plus que plaisir.....
     
    Raphaël m'a gardé longtemps contre lui..... caressant mes fesses, consolant mes seins..... un sentiment de bien-être m'a envahi.....  
    La Tendresse, cette drôle de tendresse qui me prend parfois.....
     
    J'ai eu une pensée pour Mathilde..... pour Matou, comme dit Raphaël..... pour cette voix métallique et égale.....
    j'ai imaginé un instant..... le corps d'une autre femme..... les doigts d'une autre femme s'entourant autour du téléphone, pour faire taire Ma voix métallique..... et j'ai serré plus fort mes bras autour de Lui.....
     
     "tu es un irresponsable. tout ne s'arrange pas toujours. tu n'es pas au dessus des autres..... la vie se vengera si tu continues de la toiser....."
     
    et pourtant..... la tendresse naît chez moi quand il toise..... et pourtant..... je ne peux plus détacher mes yeux des siens, quand il est au dessus de moi..... et pourtant..... il est superbe lorsqu'il est irresponsable, magnifique lorsque sa voix s'élève, et...... dans ces moments là, oui, il est Au Dessus..... Au Dessus de tous.....  
     
    Par delà ce qui s'est passé , ou ce qui se passera, je garde dans ma peau, dans mon souffle, dans chaque recoin de mon air, Ma victoire..... Ma Victoire qui enrobe mon esprit de tendresse..... Ma victoire de te voir comme ça, Raphaël.... combien t'ont vu, ou te verront avec ces yeux là?  
     
    on pourra bien me dire ce qu'on voudra, je Suis victorieuse..... tu as fait de moi une personne victorieuse..... Victoire de te voir ainsi......
     
    Victoire de connaître en moi cette tendresse qui me prend au ventre, lorsque tu toises..... lorsque tu oses..... lorsque tu t'entêtes, encore et encore, alors que tu sais que tu devrais t'arrêter,  lorsque tu jures alors que tu sais que tu mens.... lorsque tu exagères..... lorsque tu crois..... lorsque tu rends superbe la laideur de tes erreurs, lorsque tu n'as plus peur de rien, alors que tu devrais avoir peur.....  
     
    Mon cœur se tord de tendresse, lorsque tu Toises....  
     
    et ma tendresse crie Victoire.

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  • dès que nous sommes arrivés dans la cour intérieure de la "maison de ville", comme il l'avait noté sur le dossier,  j'ai compris pourquoi mon Maître m'avait dit que là-bas, ça n'était pas pour des clients de tous les jours.....
    les mosaïques colorées brillaient dans mes pupilles, et, pendant que Raphaël parlait, j'ai à peine écouté ses mots, et me suis éloignée d'eux.  
    la "véranda" m'a littéralement éblouie.... il me semblait que mon corps devenait plus léger entre ces murs, il me semblait que j'aurais pu m'envoler.....  
     
    que j'aurais pu m'envoler.....
     
    je ne me souvenais pas d'avoir déjà vu quelque chose d'aussi beau..... les vitres, autour de la pièce claire et spacieuse, semblaient mobiles tant les reflets du soleil en elles dansaient sans discontinuer..... de petits carreaux séparés les uns des autres par d'autres petits carreaux de mosaïques rougeâtre, ou argentée.... j'ai entendu plusieurs fois, au travers des ronronnements sourds des tourterelles sur les toits, Raphaël m'appeler, pour pouvoir partir, mais j'étais comme hypnotisée par ces lumières dansantes sur les murs autour de moi.... comme si mes pupilles étaient incapables de se fermer, et mes yeux incapables de se décrocher de ces petites lumières moqueuses....
     
    de hautes plantes vertes claires couraient dans la perfection des traits de cet endroit.... jamais je n'avais posé les yeux sur quelque chose de tel. aussi superbe..... une église, mais pour les humains.... je n'imaginais pas qu'un endroit tel que celui-là puisse exister.  
     
    sur le chemin du retour, Raphaël a paru surpris que cette simple pièce m'ait éblouie à ce point.... il a rigolé, a passé une main dans mes cheveux, et a murmuré "elle est disjonctée ma p'tite soumise".  
     
    je ne me doutais pas que, peut-être, cette drôle de fascination, cette étrange magie que je ne m'expliquais pas, comme un bug d'amour, un havre de paix entre mes neurones, un blocage immobilisant, soudain et inattendu, était la prédiction de..... d'une renaissance.... de la renaissance d'un mort.....
     
    mes talons claquaient clairement sur les pavés des petites rues..... Raphaël parlait argent.... il appelait le petit appartement dans la maison de ville la "perle"..... oui.... la perle ! sur ce point, je le rejoignais. je me laissais bercer par les mots techniques avec lesquels il parlait..... nous allions être comme des princes, d'ici peu, grâce à "la perle".
    tout est toujours si "faisable", avec Raphaël..... c'est pour ça qu'il me fascine.....
     
    c'est au coin d'une rue que mon cœur a cessé de battre.... il m'a semblé un instant que la lumière de la "perle" dansait à nouveau autour de moi..... impossible de respirer.... impossible de bouger..... ce corps, contre le mur.....
     
    ce corps..... endormi..... non..... simplement saoul..... ce corps..... Claude.
     
    "Nina, qu'est ce qu'il y a? Nina, qu'est ce que tu regardes?"
     
     
     
    La voix de Raphaël se fait lointaine.... si lointaine.....
     
     
     
     
    Nos silhouettes doubles soulèvent des nuages de poussière, et nous crions.... Claude a encore joué à nous terrifier, et les vieux ont sur leurs visages une moue rageuse, en direction de la 309 garée sur le sable.....

     
    Pourtant, Claude ne nous fera rien. Ce drôle de bonhomme au pantalon dix fois trop large pour ses jambes et ses hanches squelettiques ne nous fera pas de mal.  C'est une chanson qui nous le dit.  
    Tous les jours, nous passons de longs moments près de la 309, Claude chante en boucle "Envole-moi", de Goldman, et nous, nous rions......
     
    L'automne passe tout doucement, la 309 s'enfonce dans les feuilles jaunes..... et le froid arrive..... Favio pleure tous les jours, et moi je lui dis d'arrêter de pleurer, car, sinon, ses larmes vont se transformer en stalactites de glace dans le mistral.... ça le fait rire, il rit, et, au moins, il ne pleure plus....
     
    La 309 est un havre de chaleur, nous nous y blottissons, et Claude ramène des petits jerricans d'essence, le moteur toussote, et le chauffage s'enclenche..... Nous avons chaud, Claude chante "envole-moi", le son de sa guitare résonne dans la voiture et nous, nous sourions..... Claude est calé entre les sièges avant, et nous , sur la banquette arrière, nous sommes son public. un public enthousiaste et joyeux.
     
    le seul souci est que les "trous" nous volent notre chaleur. et, comme les autres enfants détestent Claude, simplement parce que leurs vieux à eux leur ont dit de le détester, ils prennent un malin plaisir à bombarder la 309 avec de grosses pierres, et les "trous" deviennent un réel problème.  
    Pas pour nous. Nous, le soir, dès que la lumière s'éloigne, nous filons vers les caravanes, et nous pelotonnons l'un contre l'autre sous la couette.... C'est pour Claude que les "trous" sont le plus problématiques.....  
     
    mais..... nous sommes des "chasseurs de chaleur", et Claude a trouvé un moyen formidable de nous faire exercer notre art....  
     
    Dès lors, dès que l'une de ses bières est terminée, nous avons tous deux pour mission d'aplatir le métal de la canette. nous ouvrons le métal sur sa longueur, avec le couteau de Claude, et aplatissons longuement le fer..... Claude rit de nos efforts, ponctués de petits "gémissements", comme si nous prenions notre tâche si à cœur que les coupures sur nos doigts étaient indolores.....c'est Claude qui décrète quand le métal est assez plat.
     
    il saisit alors le marteau, et les petits clous de tapissier, et colmate les trous..... chaque fois que les autres mômes bombardent, nous colmatons..... encore, et encore..... Nous sommes des "chasseurs de chaleur", Claude est un "chasseur de bière", et l'hiver passe, tout doucement......
     
    un soir, Favio, Claude, et moi sommes couchés en diagonale le long de la portière. Comme souvent, nous "colmatons", en gémissant joyeusement.
     
    Le père de Favio, mon tonton, est arrivé. Favio et moi n'avons pas eu le temps de comprendre.... il a attrapé Claude par les cheveux, et l'a fait se relever.... Claude était trop ivre pour se défendre.... les coups de poings sont tombés à une allure effrénée sur son visage....  
     
    Favio hurle, je cache ses yeux avec mes doigts.....
     
    Mon tonton bugle des choses que je ne comprends pas, il traite Claude de "pédophile". Lorsque celui-ci est tout à fait immobile sur le sol, un bras au-dessus de son visage, tremblant, pour essayer de se défendre, mon tonton se tourne vers nous.
     
    "il vous a violé ce fils de pute?"
     
    Favio m'interroge du regard, ne sachant pas ce qu'il doit pas répondre..... je ne sais pas non plus.
    je ne sais pas ce que signifie "violer".....
    je pense à "voler"..... voler..... envoler..... "envole-moi"...... oui..... Claude nous a envolés, pour quelques mois...... Favio voit dans mon regard un signe d'approbation.
     
    il tanque courageusement son regard noir dans celui de son père, et, insolemment, il dit
     
    "oui."
     
    comme il n'y a pas de réponse, et que Favio et moi haïssons son père d'avoir tabassé Claude, Favio ajoute: "et alors?"
     
    ce silence, toujours......
     
    "qu'est ce que ça peut faire?"
     
    D'un geste brusque, mon tonton nous tourne le dos....il est en train d'achever Claude à coups de pieds. "salaud, pervers......" . Claude essaie de se protéger, avec sa guitare, elle fait les frais des coups, puis se cogne durement contre la taule de la voiture, et ne le protège plus....
     
    j'ai envie de hurler pour que tout s'arrête, mais j'en suis incapable. je murmure "arrête. j't'en supplie, arrête." mais pas un son ne sort de ma bouche. Ma voix reste dans ma poitrine.
     
    Claude est immobile sur le sol lorsque mon tonton, haletant et ruisselant, s'arrête de le cogner.
    j'ai essayé de cacher les yeux de Favio, pour qu'il ne voit pas..... pour qu'il ne voit pas notre "ami" mourir.....  
     
    le pantalon trop large de Claude lui a glissé à mi-cuisses, pendant qu'il rampait sous les coups, et, lorsque nous nous éloignons, son sexe mou, reposé sur sa cuisse, laisse échapper un filet d'urine.... c'est la bière, je crois......
     
    nous suivons sans un mot le père de Favio qui s'éloigne de la 309, ses doigts resserrés autour de nos nuques, comme pour nous protéger.....  
    le soir, le ton s'élève plus haut que d'habitude derrière les fines parois des caravanes.....
     
    "on décolle. vite."
     
    j'ai emballé mes affaires...... et celles de Favio..... il y a des choses que je n'ai pas eu le temps d'emmener..... des chats que je n'ai pas eu le temps de retrouver.... moins d'une heure s'est écoulée entre le dernier coup de pied dans le ventre de Claude, et le vrombissement unanime de nos moteurs.....
     
    lorsque la voiture passe près de la 309, je pose mes doigts sur les yeux de Favio, et je sens son corps sangloter contre le mien....
    Etrangement, la seule chose à laquelle pense Favio, ce sont les animaux que nous n'avons pas eu le temps de retrouver , pour les emmener encore avec nous..... nos chiens..... nos chats.... Favio murmure le nom de nos animaux, en sanglotant contre moi....
     
    moi, je ne pense qu'à Claude.
     
     je me penche discrètement à la fenêtre, pour que mon tonton ne voit pas..... je fixe la terre qui entoure la 309.....
    Claude n'est plus là.....  
     
    ce sont les anges qui l'ont emmené..... je suis sûre que ce sont les anges..... ils l'ont "envolé", et Claude ne sera plus jamais embêté par les trous.....

     
     
     
    "Nina, pourquoi tu pleures?"
     
    ce corps..... contre le mur.....
     
    Claude.  
     
    je m'approche doucement, et m'accroupis devant lui..... je sens le regard de mon Maître, derrière moi, qui ne comprend rien.....
     
    je prends les mains de Claude entre les miennes..... elles sont sales..... son souffle sent l'alcool.....  
    mais..... il vit.
     
    de grosses larmes roulent le long de mes joues..... je murmure "Claude....." je répète son nom plusieurs fois, à voix basse....
     
    il ne se réveille pas. tant mieux. qu'est ce qu'il penserait de la petite fille qui a laissé dire qu'il avait "violé"..... je passe mes doigts sur son visage......  
     
    je suis restée longtemps accroupie devant cet homme.....
     
    "nina, tu le connais?"
     
    je ne réponds pas..... pour mon Maître, c'est un SDF, juste un SDF. pour moi, c'est un ange revenu du pays où l'on vole..... un ange vivant.... je ne peux plus arrêter mes larmes.....
     
    "nina, s'il te plaît, explique moi. s'il te plaît."
     
    je repousse mon Maître.
     
    je fouille dans mon sac, et n'y trouve que vingt euros..... vingt euros..... rien. pour ainsi dire rien. comparé à ces mois d'hiver....
     
    je les glisse entre les mains sales de Claude.... je ressers ses doigts autour de l'argent.....
     
    "nina, je ne sais pas à quoi tu joues, mais cet homme, il va la boire ta thune. t'es cinglée ma puce."
     
    je me relève, essuie mes larmes du plat de la main..... j'ai du mal à dégager mon regard du corps de Claude..... sa guitare est à côté de lui, posée sur le sol. je la glisse contre lui, plus près de lui..... pour qu'il ne la perde pas..... je me force à m'éloigner....  
     
    Raphaël n'a pas posé plus de questions.  
     
    il n'a pas compris, mais il a essayé de se forcer à respecter.
     
    Nous sommes rentrés chez nous....  
     
    le soir, lorsque Raphaël a voulu "jouer", en m'envoyant gaiement "à ma place", au pied de notre lit, je n'ai pas obéi.....  
    je suis venue me blottir contre son corps..... une sérénité que je ne connaissais pas m'a envahie..... le "jeu" m'a paru dérisoire.....  
     
    j'ai pensé longtemps..... à comment je me sers parfois de Raphaël, vivant mes "petits drames" silencieux en moi, pendant qu'il frappe..... sans jamais lui dire.....
    j'ai imaginé un instant que, peut-être, lui aussi, en frappant, vivait ses "petits drames", dont il parle si peu.....  
    j'ai murmuré "je t'aime Raphaël."
     
    je ne lui avais jamais dit..... en un an, jamais.  
     
    il a passé ses doigts sur mon visage, longuement..... "je sais ma puce....."
     
     
     
    moins d'une semaine après que j'ai revu Claude, mon Maître m'a emmené à nouveau dans la petite rue du logement "perle".
     
    Claude n'était pas là.
     
    Mon Maître a posé un bandeau sur mes yeux, nous avons monté l'escalier, j'ai entendu les clefs tourner dans la serrure, nous avons traversé la pièce et, arrivés dans la véranda qui m'avait tant fascinée la première fois, mon Maître a retiré le bandeau de mes yeux.
     
    il avait dessiné sur le sol, avec des petites bougies allumées, un chemin de moins en moins large, jusqu'au centre de la pièce.... nos deux corps ont joué longtemps l'un avec l'autre..... la cire des bougies a dessiné des formes fines sur mon corps..... j'ai gémi longuement en jouissant contre mon Maître..... j'ai eu l'impression de "m'envoler", sous ses doigts.... sous ses caresses.... sous sa langue.....
     
    et j'ai contemplé la lumière des bougies, qui se reflétait dans les vitres, et qui, une par une, s'éteignaient à mesure que nous mélangions plaisir et douleur....
     
    lorsqu'elles ont toutes été éteintes, j'ai réalisé que le "dessin" qu'elle formaient était peut-être la manière de Raphaël pour répondre à mon "je t'aime".....

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  • "nina, mange !"
     
    je fais mine de touiller dans mon riz, peut-être que si les grains jaunis par le curry filent sur les côtés de mon assiette, il ne réalisera pas que ça ne passe pas....
     
    à la télé, ils disent qu'il va y avoir de gros orages en fin de journée, et que notre département est en alerte orange. je jette un coup d'œil par la fenêtre, et je pouffe de rire. Le ciel est plus bleu que jamais, et les cigales sont déjà sorties !
     
    "tu m'as saoulé hein nina, tais-toi un peu !"
     
    je relève un regard surpris vers lui, et croise ses yeux rieurs. oui..... c'est vrai, je crois que je ne lui ai pas lâché plus de trois mots depuis qu'il est rentré, tout à l'heure.
    je lui souris.
     
    "excuse moi."
     
    Son attention se reporte vers la télé, les images des inondations, dans les autres régions, sont impressionnantes.
     
    "je crois que j'ai bien fait de reprendre la pente de la Chappe, sinon on aurait eu une piscine, pour cet été!"
    c'est vrai que les orages sont toujours violents, ici, mais...
     
    encore un regard vers le ciel.... "non, il pleuvra pas, regarde ..."
     
    ça fait un moment qu'il a fini de manger....
     
    " déjà que tu mangeais bizarrement, mais maintenant tu as décidé de ne plus rien manger, c'est ça?"
     
    je baisse les yeux.... ma technique du "pousse-riz" n'a pas marché, je crois.... il dit que je mange "bizarrement", parce que je refuse toujours de manger les animaux, mais moi je me souviens....
     
    j'étais sûre d'être la personne la plus heureuse de la terre, quand il m'a dit: "nina, tu viens avec moi pour la semaine?"

     
    je me suis inquiétée: "mais et ton patron?"
     
    "mon patron, je m'en fous, dans deux semaines on s'en va, et j'en aurai un autre. et au pire, tu te cacheras. bon, tu viens ou pas?"
     
    le souvenir des fois où j'étais cachée sous la grosse couette, retenant avec peine un fou rire, m'est revenu en mémoire, et je me suis sentie plus joyeuse de plusieurs années.
    j'ai dit au revoir et j'ai embrassé dix fois mon tonton, avant de filer en courant, toujours cette crainte, que, quand je revienne, il ne soit plus là, on ne sait jamais....
     
    le camion me paraissait énorme, et les vibrations de la route me faisaient sautiller sur la banquette, à côté de mon père.
     
    je piaillais, comme pour lui faire un condensé de ces six mois écoulés, tout y est passé, l'école, les amies, les histoires d'Abuela... il me semblait qu'il fallait que je rattrape tout ce temps murés dans le silence....
     
    lui, il souriait, et répondait par de petits "a!" "non?"! "a bon?!"
     
    son visage me semblait moins éteint, et, malgré moi, je voulais profiter de cette longue route pour lui donner un concentré de joie de vivre, espérant secrètement réussir à le faire sourire....
     
    à l'aire de camions, le chocolat brûlant a réchauffé mes lèvres gercées par le froid glacial de l'autoroute.
     
    il est descendu dans ma gorge comme un réconfort inattendu dans ces mois sans lumière, aussi chaud que la voix de mon père qui résonne plus fort que les autres, au dessus de celle des autres conducteurs....
     
    au moment de ranger, il enfile sa veste, et, sous celle-ci, l'ours jauni de Favio, que j'ai bourré avec les graines de lavande, tombe du siège, sur le béton.
     
    mon père a l'air moqueur. "c'est à toi, ça?"
     
    "non, c'est à Favio, j'ai oublié de lui laisser."
     
    son visage se ferme.....
     
    c'est le moment où jamais..... je vais sauter sur l'occasion !
     
    "est-ce que tu crois que tu peux essayer de l'aimer, un tout petit peu?"
     
    je regrette déjà de ne pas m'être tue..... la gifle à laquelle je m'attendais tombe..... le chocolat prend un goût de sang..... les autres conducteurs me fixent, je voudrais pouvoir disparaître de honte, je n'ai envie que d'une chose, c'est de partir loin de cette aire d'autoroute, et de rentrer au camp....
     
    je ramasse l'ourson jaune, et retourne au camion. le froid va me tuer. j'entends les bêtes qui pleurent dans le camion à côté du notre.... et le sang, dans ma bouche, qui continue à me noyer.... le même goût que lorsque je cuis mal la viande du petit.... le sang des vaches a le même goût que mon sang. les pleurs des bêtes et leur odeur m'assiègent.....  
     
    plus jamais je ne mangerai leur douleur, puisque leur douleur a le même goût que la mienne....plus jamais je ne parlerai aux adultes.... plus jamais. je ne dirai que ce qu'ils ont envie d'entendre....

     
     
    "réponds-moi nina !"
     
    je lui souris..... "mais non, c'est juste que je suis stressée, à cause du travail."
     
    "pourquoi?"
     
    "j'ai peur que la nouvelle équipe ne m'aime pas, ou que ça se passe mal."
     
    "pourquoi tu dis ça?"
     
    j'hésite un instant..... et décide d'éviter le sujet..... je prends un air rieur "laisse tomber. t'as toujours pas besoin d'une secrétaire, par hasard?" ça serait tellement plus simple, si seulement je pouvais travailler avec mon Maître.... pas besoin de faire ses preuves.... mais bon, ça ne servirait à rien, ça ne ramènerait pas de sous....
     
    "réponds moi nina. pourquoi tu as peur?"
     
    je baisse les yeux..... j'en ai trop dit, ou pas assez....
     
    "leur chef ne voulait pas me garder, à cause de..... tu sais bien.... mais il a été obligé. je ne suis pas licenciable, puisque je fais mes résultats."
     
    "à cause de quoi nina?"
     
    je n'ai pas envie de lui répondre..... "tu sais bien...."
     
    "non, je ne sais pas. dis le moi."
     
    "à cause de mon accent. tu le sais !" j'ai élevé un peu le ton, il m'énerve à faire mine de ne pas voir.....
     
    il fait claquer doucement sa langue, je sais bien qu'il n'aime pas quand j'élève la voix contre lui.... je baisse le visage.... son silence me paraît trop long.....
     
    "ton accent.....oui..... je sais."
     
    je croise à peine son regard, mais comprends bien que je ne vais pas rester "stressée" très longtemps.... tant mieux....
     
    "tu as ton dernier scripte que tu as dû apprendre?"
     
    je murmure "oui...."
     
    "bien. va le chercher nina"
     
    je lui ramène la feuille de papier, mes mains ont déjà commencé à trembler.....
     
    "pose tes doigts là."
     
    j'hésite un instant, mais sa voix ne laisse pas place à la contestation.... tant mieux....il m'indique sa cuisse, je m'agenoue sur le carreau, à côté de lui, et ouvre mes doigts sur sa jambe....sa main se sépare au milieu de mes poignets, autour desquels il resserre ses doigts, et qu'il plaque sans concession possible contre sa peau....
     
    j'ai envie de fermer les yeux, mais il pose sur mes avants bras la feuille de papier, et murmure "lis."
     
    je vois bien qu'il saisit de sa main libre la petite règle de métal carrée, mon sang ne fait qu'un tour, mais je n'ai pas le temps d'avoir peur.... malgré moi, j'entends ma voix qui s'élève, et qui lis.....
     
    le premier coup tombe..... mes doigts se resserrent.... un claquement de langue, et ils se déplient....
    les autres coups font trembler tout mon corps. bien malgré moi, j'essaie de me dégager, mais mon Maître me tient fermement.....  je ne savais pas qu'il pouvait y  avoir autant de "u" sur une seule page.... ma voix commence à ne plus ressembler à grand chose, et les erreurs que je parvenais à corriger au début se succèdent au même rythme que les coups....
     
    mes gémissements de douleur et mes sanglots ponctuent ma lecture.... je n'y arriverai jamais.... c'est Impossible.... je commence à craquer, et n'arrive plus à lire trois mots de suite sans m'effondrer.... lorsque je sens la pression de ses doigts se relâcher autour de mes poignets, je ramène mes mains vers moi, mais suis incapable de les serrer.... la feuille de papier, tâchée de petites gouttes de sang, et de petites gouttes de larmes se froisse contre ma poitrine....
     
    à genoux contre lui, je sanglote doucement.... je sens ses doigts caresser ma joue, et je les embrasse au passage.... je le laisse me prendre contre lui.... et mes larmes cessent aussitôt....
     
    c'est lui qui soignera mes doigts, un par un, quelques minutes après.... je suis à genoux et embrasse son sexe du bout des lèvres, puisque c'est tout ce qu'il me reste pour le combler, pendant que le coton imbibé fait trembler mes mains.... l'alcool est pur, et la douleur me glace de l'intérieur, mais je ne fais pas un geste pour me retirer.....  
     
    "et si on allait chez Marielle, ça nous changerait les idées, non?"
     
    oui.... après tout, oui.  
     
    je lui demande quelques minutes, et je file à la salle de bain. je tourne le bouton de la radio, j'entends qu'il pouffe de rire. c'est "radio suicide" , comme il dit.....  
    je démêle à la hâte mes cheveux, enfile une petite robe que..... je pourrai retirer facilement....  
     
    lorsque je ressors, il glisse sans un mot une main entre mes cuisses, et me sourit, en constatant que, comme d'habitude, j'ai fait selon sa volonté. pas le moindre morceau de tissu ne lui vole mon intimité.
     
    dans la voiture, j'ai déjà oublié le travail, et une petite bouffée de bonne humeur m'envahit. il fait une lourdeur étouffante dans le parking, et les rues sont désertes, la chaleur a cloîtré les gens chez eux et un drôle de vent bouscule les feuilles mortes, et fait claquer les volets. cette ville m'effraie, parfois.
     
    le petit carillon de chez Marielle me fait sourire. elle a l'air surprise de nous voir, elle était en train de dessiner un modèle que j'adore.
     
    mon Maître l'embrasse sur la joue, et Marielle dépose un baiser sur mon front.
    je parcours la pièce du regard, comme d'habitude, une odeur d'encens que j'adore se dégage du petit comptoir, et les rideaux, multicolores, dansent sous le petit courant d'air frais de la fenêtre d'en haut.  
     
    "ça fait longtemps que vous n'êtes pas venus."
     
    elle est jolie Marielle. Elle a le flegme et le calme des artistes.....
     
    mon Maître me pousse doucement vers l'arrière de la boutique, et me fait signe de retirer ma robe. un reste de honte, venu de je ne sais pas où, me fait hésiter. Marielle le voit bien, et me sourit. Le regard de mon Maître, lui, ne laisse plus place au refus, maintenant, et je laisse glisser le tissu le long de ma peau....
     
    j'ai du mal à être à l'aise, et garde le regard baissé....
     
    Marielle ramène ses derniers modèles.
     
    "c'est magnifique, comme toujours." mon Maître glisse un baiser contre la nuque de Marielle, et saisit le tissu entre ses doigts, puis me tend les sous vêtements qu'il préfère.
     
    pour dissimuler ma honte, je garde mon regard dans celui de mon Maître, tandis que les différentes pièces de dentelle pâle s'invitent les unes après les autres sur mon corps nu. parfois, devant ma maladresse, nos trois rires s'élèvent, clairs et discrets.
     
    les doigts de Marielle viennent se joindre aux miens, et sa douceur parvient à me faire oublier ma honte. lorsqu'elle noue les liens pâles du modèle qu'elle était en train de dessiner autour de mes jambes, je jette un regard joyeux vers mon Maître, et il acquiesce. Marielle a réellement un don, et, sous ses doigts, on se sent "redessinée"....
     
    "Alors, tu es décidé?" Marielle rigole doucement, mon Maître semble incapable de choisir.....
     
    je joins mon regard à celui de Marielle pour me moquer gentiment de lui, j'adore ce petit air indécis sur son visage.
     
    "Je te fais confiance."
     
    il tire le rideau orangé derrière lui, et laisse le soin à Marielle de choisir pour lui. Sa présence me manque déjà, et je suis un peu déçue, mais, très vite, Marielle chuchote doucement à mon oreille des mots qui me font rire, sans bruit, pour que mon Maître ne m'entende pas. des gestes que je n'aurais sûrement pas osés, mais qui, selon elle, rehausseront encore le pouvoir de ses "œuvres de tissu". sous son regard brillant, je joue à reproduire les gestes que je mettrai sans doute en application pour mon Maître, et je me sens légère.....
     
    lorsque je replie le rideau derrière moi, mon Maître ne me voit pas..... il fixe un petit livre.... je me glisse sans bruit derrière lui, et pose les yeux sur les images qui ont l'air de le rendre si euphorique....
     
    ce sont...... des bijoux.... un peu spéciaux.... il m'en avait déjà parlé, j'avais murmuré "non", et il n'avait pas insisté....
     
    je fixe longuement les photos de ces lèvres rosies, marquées de petits anneaux.... petits anneaux d'appartenance.... une preuve de plus.... machinalement, mes doigts passent sur mon collier.....
     
    je ne le vois pas se retourner, et me fixer..... lorsque je croise son regard, je baisse le mien.
     
    il me fixe longuement, sans dire un mot.... il n'en a pas besoin.... il a vu mon regard.... il sait que j'ai changé depuis mon dernier "non".  
     
    je sens ses doigts se promener à la base de mes lèvres, et descendre doucement.... lorsque je croise à nouveau son regard, j'acquiesce prudemment. une petite pression sur mon bouton de plaisir, je gémis doucement, et je ferme les yeux.... la peur me prend, mais il n'en saura rien.
     
    un baiser sur mon front, et il s'éloigne sans rien dire. j'aperçois, derrière le rideau qui se referme rapidement, Marielle, qui était en train d'emballer les petites merveilles qu'elle m'avait aidé à choisir.
     
    j'entends leurs chuchotements, je commence à trembler.... la panique est en train de me gagner, l'encens me prend à la gorge , et la pâleur des murs tourne autour de moi.
     
    lorsque le rideau s'ouvre à nouveau, Marielle me sourit, dépose un baiser sous ma nuque, et serre ses doigts autour de mon poignet. je soupire , pour me forcer à respirer, et la suis, avec un dernier regard vers mon Maître.
     
    lorsque je vois qu'il nous emboîte le pas, ma peur s'estompe un petit peu..... Marielle recouvre la tablette d'un drap jaune pâle, qui, en se dépliant, embaume la pièce d'une odeur de lessive séchée au grand air.
     
    de moi-même, je viens me placer sur la tablette. je ferme les yeux lorsque je sens les doigts de Marielle qui nouent autour de mes chevilles les liens qu'elle serre fermement.
     
    elle jette un regard surpris à mon Maître, lorsqu'elle noue mon poignet gauche, et lis dans ma main les traces de la sanction que j'ai reçue avant de partir de la maison. je replie doucement mes doigts, et détourne le regard.
     
    je suis des yeux la silhouette de mon Maître qui me contourne, et vient serrer ses doigts autour de ma main libre. j'oublie la douleur dans mes mains, et m'accroche à la sienne. je pose mon front sur son avant bras, et je ferme les yeux.
     
    je sens un coton humide se promener sur mes lèvres, mon cœur bat beaucoup trop vite, j'ai envie que tout s'arrête, mais je ne dis rien.
     
    à chaque fois que l'air sort de mes poumons, un faible gémissement que je n'arrive pas à retenir s'échappe de mes lèvres, dicté par la peur.
     
    il me semble déjà sentir le métal gelé sur mes lèvres, je ne peux pas m'empêcher d'avoir un mouvement de recul, je serre plus fort les doigts de mon Maître entre les miens.
     
    une caresse de Marielle sur mon ventre, je comprends ce qu'elle signifie, je cesse de respirer, tous mes muscles, malgré moi, se contractent de peur, le mince filet de lumière que mes yeux captent, derrière la peau de mon Maître se met à tourner à toute allure autour de moi. je sens déjà la douleur...... je la sens déjà.......  
     
     
    lorsque j'ouvre à nouveau les yeux, un bruit assourdissant au dessus de moi m'effraie. je sursaute et me relève d'un seul coup, je croise immédiatement le visage de mon Maître.
     
    je ne ressens aucune douleur.... je l'interroge longuement du regard, il a l'air si fier de moi.... il est si beau quand il a ce regard là.....  
    prudemment, je glisse une main entre mes cuisses..... mais..... la fine peau de mes lèvres est toujours aussi vierge d'appartenance.....
     
    les larmes me viennent aux yeux.... je n'ai pas réussi..... je n'ai pas réussi.
     
    je ramène mes jambes contre moi, pour étouffer un sanglot. je relève les yeux au dessus de moi, le vacarme est celui de la pluie..... les cigales ont fini par se taire, finalement.
     
    j'ai si honte....  
     
    il s'approche de moi, et glisse ses doigts sur mon visage, il pose ses lèvres sur les miennes....
     
    "je suis fier de toi nina."
     
    je frémis..... pourtant, je n'ai pas réussi. je murmure "mais...." il pose ses doigts sur mes lèvres.
     
    "mais rien. je suis fier de toi."
     
    il entoure ses bras autour de moi, et me garde longtemps contre lui.... je crois qu'il est simplement fier que j'ai dit oui, même si ma peur m'a empêché d'y arriver....
     
    je me sers plus fort contre lui.
     
    lorsque nos corps se séparent, je cherche Marielle du regard, mais elle n'est pas là.
     
    Mon Maître, sans un mot, m'aide à m'habiller, et pousse la porte. le petit carillon résonne joyeusement dans le vacarme assourdissant de la pluie sur la gouttière de taule.
     
    les derniers traînards pressent le pas, pour éviter la pluie.  
     
    à côté de mon Maître, je me sens minuscule, et je réalise, en suivant son pas, à quel point je suis chanceuse d'être à ses côtés. je m'en veux pour toutes les fois où je l'ai maudit en moi-même de me laisser seule, ou de m'appeler " petit bout de femme", comme si je n'étais rien d'autre. le "petit bout de femme" que je suis, à côté de lui, est plus grand que toutes les "femmes" que je pourrais être. je me déteste d'oser si souvent remettre ça en question.
     
    la pluie trempe nos corps..... il n'y a plus personne d'autre que nous dans la rue....  
     
    lorsque Raphaël me pousse doucement dans la petite ruelle , je ne comprends pas très bien.... le parking n'est pas par là! il me fait danser sur moi-même, pour que je me retrouve face au mur, et relève ma robe sur mes fesses.
    il pleut bien trop pour que quiconque passe ici. la pluie trace de longues traînées brillantes sur nos corps, je pose mes doigts sur le béton, devant moi, et m'offre à mon Maître. j'entends les volets qui se claquent , dans la rue principale, les gens qui crient d'une fenêtre à l'autre, qui paniquent devant l'eau qui monte, le long de la pente de la rue.
     
    je ferme les yeux. je sens le sexe de mon Maître s'enfoncer en moi. l'orage explose derrière nous, un éclair illumine notre petite rue.  
     
    la pluie se fait aussi violente que le sexe de Raphaël dans mon ventre. mes gémissements de plaisir sont masqués par le bruit de la pluie, mes doigts se crispent sur le béton, lorsque je sens son sexe s'enfoncer d'un seul coup dans mon petit trou..... aller de l'un à l'autre, alternant une brutalité que je chéris tout autant que sa douceur, avec une tendresse dont je me nourris jour après jour.
     
    je sens ses ongles s'enfoncer dans mon ventre, puis dans mes seins..... son sexe se défouler violemment dans mon anus.... de petits cris de douleur s'échappent de mes lèvres....
     
     la pluie se calme en même temps que lui, et en même temps que moi....
     
    les larmes de plaisir, sur mon visage, se mêlent aux énormes gouttes célestes, salées à la commissure de mes lèvres..... l'épuisement me fait tomber à genoux face à ce mur que je ne vois même plus, et je sens son corps s'accroupir derrière moi, ses genoux entourer ma taille, et ses bras me serrer contre lui.
     
    il n'y aura plus personne lorsque nous traverserons sans hâte la rivière grise qui a envahi la rue principale. plus personne d'autre que nous. juste deux silhouettes oubliées de tous dont les chevilles narguent le torrent grisâtre, juste deux silhouettes devenues ivres de  
    douleur, souples de plaisir.... deux silhouettes qui ont oublié de se presser sous l'orage et qui le regardent s'éloigner, déjà.... toujours plus loin....

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  • C'est presque la fin de la nuit lorsqu'il accepte enfin de me laisser le volant. Ses yeux se ferment malgré lui, et notre idée de passer par "la campagne" pour rentrer n'était peut-être pas la meilleure. C'est la deuxième fois qu'il me prend avec lui, quand il part travailler un peu plus loin, et ça me rend réellement heureuse. J'en oublie même le regard contrarié de ma chef , quand je lui sortirai une excuse stupide pour justifier mon absence.
    Le matin où l'on est parti, juste pour quelques jours, alors que la clef était déjà tournée dans la serrure, il m'a demandé de retourner chez nous avant de partir, pour récupérer "notre" sac. Ce sac contient les objets que nous affectionnons, et qui lui servent à renforcer le lien un peu spécial que nous avons construit.
    J'ai tremblé doucement, quand il m'a demandé ça. Et, pendant ces quelques jours, j'ai pris garde à être plus à l'écoute, plus disponible, et plus patiente que jamais. Le sac est resté sagement dans le coffre de la voiture.
    Au moment où il s'est endormi, je suis restée plusieurs longues minutes à contempler son visage.... je crois que j'ai davantage regardé son visage endormi que la route sombre, à peine éclairée par les phares, devant moi.
    Puis, sentant que moi aussi je tenais difficilement éveillée, j'ai branché l'autoradio. En pleine campagne, je n'ai réussi à capter qu'une seule station, qui grésillait plus qu'elle ne fonctionnait. J'ai cru reconnaître une chanson de Ben Harper.... ça n'était peut être pas ça, d'ailleurs.
     
    Le matin commence à se lever. Les petites routes se ressemblent toutes tellement. Je suis sérieusement en train de me demander si je ne nous ai pas perdus.... Il n'y a aucun panneau... Les routes semblent devenir de plus en plus petites.  
    Arrivés à une croisée de deux routes, je ralentis.... deux routes exactement identiques. Pas un seul panneau....
    La voiture s'immobilise, je pose mon menton sur le volant, et je soupire....
    je murmure "putain.... sa race la campagne ! "
    Je sursaute lorsque je sens Ses doigts se poser sur mon épaule. je lui souris: "T'es réveillé?"
     
    "oui. arrête toi à droite."
     
    je gare la voiture à l'entrée du champ....je croise discrètement les doigts pour qu'il n'ait pas entendu mes mots.
    je m'excuse, pour le temps que l'on va perdre: "je crois qu'on est perdus."
    il se frotte les yeux, pour se réveiller tout à fait. "non. je connais ici. t'inquiète pas, on est pas perdus."
     
    il ouvre sa portière, et allume une cigarette.  
     
    "nina, de quoi on a parlé la semaine dernière?"
     
    il a entendu mes mots.
     
    je murmure: "des trois choses auxquelles je dois faire attention maintenant."
     
    "oui."
     
    il reste silencieux..... pendant de longues minutes. un petit courant d'air frais entre les deux portières caresse mon visage.
     
    "et quelles sont ces trois choses nina?"
    je baisse le visage.... je sais bien que je n'y ai pas fait attention.....
     
    " la tristesse, le mensonge ....."
     
    "et ? "
     
    "et la vulgarité."
     
    "oui. "  
     
    les secondes s'égrainent, interminables, avant qu'il ne reprenne la parole....
     
    "tu crois que tu as fait autant d'efforts que tu le pouvais sur ces trois points, depuis qu'on en a parlé, nina?"
     
    je réfléchis, quelques instants.....
     
    la tristesse..... mon Maître ne m'interdit pas d'être triste, parfois.... simplement, il ne veut pas d'une "soumise sans sourire".... je le comprends. et, surtout, il ne supporte plus que je m'éloigne de lui, quand je suis triste.
    deux nuits de suite cette semaine, j'ai pleuré à cause d'un cauchemar.... je sais bien que mes pleurs l'ont réveillé. il m'aurait juste suffi de me blottir contre lui, et il les aurait séché en quelques minutes.... au lieu de cela, je quitte notre chambre, et je laisse le chagrin gagner sur moi. c'est pour moi, uniquement pour moi et pour mon bien, s'il a fini par décider de mettre la tristesse dans les trois points sur lesquels la soumise que je suis doit travailler. si je ne suis pas capable de m'en sortir par moi-même, qu'au moins je lui laisse une possibilité de m'aider....
    au lieu de cela, moi, je m'éloigne..... non, je n'ai pas fait autant d'efforts que je le pouvais, sur ce point.
     
    le mensonge.... je sais bien à quoi il pense.... à ce fameux album photo. qu'il m'a interdit de continuer à ouvrir. mais.... c'est plus fort que moi.... chaque fois, le tiroir m'appelle, j'aime tellement me laisser aller dans les souvenirs de mon Maître.... les photos de lui et de sa femme, de son fils.... sa jeunesse qui passe, tout doucement... sa beauté qui reste. j'ai une tendresse indéfinissable pour ce passé de lui que je n'ai pas connu. j'adore cet album.  
    mais.... il me suffirait juste d'obéir. ou, au moins de ne pas mentir.  
    au lieu de cela.... je mens, j'arrange la vérité.... tout le temps. c'est tellement plus facile.... quand il m'a dit: "je sais que tu as ouvert l'album, quand je n'étais pas là, dis le au moins!", je me suis entêtée.... j'ai nié, et nié encore.... et, pire: j'ai haussé le ton contre lui, pour essayer de dissimuler mon mensonge.  
    le mensonge..... non, je n'ai fait aucun effort sur ce point.  
     
    la vulgarité. ça n'est pas exactement comme ça que mon Maître appelle cela. lui, il dit: "le parler -  rat d'égout". pourtant.... ça n'est pas dans ma nature de parler comme un rat d'égout.... je ne sais pas pourquoi il faut toujours que des expressions venues d'avant, de quand les gens autour de moi n'étaient pas aussi "bien" que mon Maître, viennent sortir de mes lèvres....  
    mais je reconnais que mon Maître mérite mieux qu"un "rat d'égout" à ses côtés....  
    et.... là encore, je viens de prouver qu'il suffit juste qu'il s'endorme, pour que je ne fasse plus aucun effort.
     
    je relève les yeux vers mon Maître.... il me regarde, me fixe, attendant ma réponse.... il sait bien ce qu'elle sera.
     
    "non Monsieur. non, je ne crois pas avoir fait autant d'efforts que je le pouvais."
     
    je baisse le visage.... ça y est .... je l'ai dit.... "Monsieur".... je viens de donner le feu vert. pourtant, je pensais vraiment que notre sac allait rester dans le coffre jusqu'à ce que nous rentrions.
     
    il écrase sa cigarette contre le sol. un petit signe de tête.... j'ai même l'impression qu'il a envie de me sourire.  
     
    "allez nine."
     
    je claque la portière derrière moi....le rejoins sur le bord du champ.
    debout devant lui, les bras le long du corps, et le visage baissé, je le laisse retirer un à un mes vêtements.... dévoilant mon corps tremblant dans la fraîcheur de ce nouveau jour, qui naît tout doucement.
     
    un peu inquiète, je murmure: "et si une voiture passe?"
     
    "tais toi."
     
    je mords sans serrer ma lèvre, pour me faire taire.... ne portant pas de sous-vêtements, puisqu'il me l'avait demandé, je me retrouve rapidement nue, nue et à lui.
     
    il défait le petit chignon que j'avais noué à la va-vite dans mes cheveux avant de quitter le parking, et mes cheveux retombent dans mon dos, et sur mes épaules.
     
    étrangement, j'ai un peu peur mais.... je me sens toujours plus belle que je ne l'ai jamais été quand ce sont ses doigts qui se posent sur moi.... il me semble même que mon cœur bat autant de bonheur, que de peur.
     
    je relève un regard prudent vers lui, et tend mon visage lorsqu'il pose ses lèvres sur les miennes....
     
    nos lèvres se séparent lorsqu'il presse sur mes épaules, et que mes genoux touchent le sol....
     
    lorsque le sac nous rejoint, je frémis..... la fermeture éclair brise le silence de notre campagne, encore endormie.
     
    de moi-même, je pose le haut de mon corps et mon visage contre l'herbe humide, lorsqu'il saisit entre ses doigts le plug.
     
    je reconnais facilement le plug gonflable , qui permet l'insertion de liquide dans mon ventre.
     
    je me tends vers la douleur à venir.... la sachant méritée.... l'attendant, comme chaque fois, presque comme un soulagement.  
    sans me brusquer, les doigts de mon Maître enfoncent, centimètre par centimètre, le plug en moi.... je n'émets pas un son, et ne fais pas un mouvement....  
    lorsque je sens le plug grossir en moi, je gémis doucement.... j'ai un mouvement pour me retirer.... mais Il sait que je n'en ferai rien.  
     
    "dis moi de stopper quand tu ne peux plus."
     
    il dit toujours ça, mais il sait bien que je ne dis jamais rien. le plug est en train de devenir de plus en plus important, en moi, ma respiration s'accélère, j'ai l'impression d'être déchirée.... je ferme les yeux.... je fais des efforts pour rester immobile, mais commence à gigoter....
     
    "nine...."  
     
    il fixe mon visage, attend que je dise stop...... je ne dirai rien.... plutôt mourir que d'avouer que je ne peux pas lui donner toujours plus.... je me réfugie dans le gris de ses yeux, pour me faire taire....  
     
    "tu ne le diras pas, pas vrai?"
     
    je lui souris.... une fierté immense m'envahit.... il caresse doucement mes cheveux, et finit par arrêter l'agrandissement du plug, sans que je n'ai prononcé un seul mot.
     
    je sens le liquide commencer à entrer en moi.... peut être qu'il avait déjà commencé, et que je ne l'avais pas senti.... Mon ventre s'arrondit, j'ai gardé la même position, mais j'ai à présent l'impression que mon corps est trop dur à maintenir ainsi..... mon ventre commence à être plus que douloureux, je gémis doucement.... je danse d'un genou sur l'autre.....
     
    "arrête de bouger nina".
     
    il s'accroupit devant moi, et prend mon visage entre ses doigts..... le liquide semble vouloir faire éclater mon ventre, j'ai du mal à garder les yeux ouverts.... j'ai du mal à respirer.
     
    son visage est tout proche du mien.  
     
    "nina.... l'album photo...."
     
    j'ai un petit mouvement de recul.... recul d'une fierté mal placée, qui m'empêchera de dire quoique ce soit, maintenant que je lui ai déjà menti.  
     
    "tu l'as pris, oui ou non, nina?"
     
    je détourne les yeux.... je ne peux pas le regarder. je ne suis pas quelqu'un de bien. il est si pur, et moi je mens si souvent.  
     
    "dis le moi."
     
    je reste silencieuse.... la douleur est en train de me rendre folle....  
     
    "nina, regarde moi."
     
    les larmes restent, par je ne sais pas trop quel miracle, au coin de mes yeux....  
     
    "je n'arrêterai pas ça ( il me désigne le petit réservoir d'eau tiède, à nos côtés. ) tant que tu ne m'auras pas dit la vérité."
     
    je sanglote doucement, et suis du regard ses doigts, qui baissent légèrement le débit d'eau.... pour que mon ventre soit capable de tenir plus longtemps.
     
    je lui jette un regard affolé, je n'en peux plus, mon ventre va exploser, et je vais mourir de douleur, j'en suis sûre.... je n'en peux plus.
     
    sa voix se fait plus douce, lorsqu'il sent que je suis en train de craquer.... il maintient fermement mes doigts entre ses mains, pour m'empêcher de me retirer, et murmure:
     
    "c'est pas grave nina. il n'y a rien de grave. je veux juste que tu me dises la vérité, c'est tout, j'en ai assez que tu mentes. dis moi simplement si oui ou non tu as pris l'album après que je te l'ai interdit, et tout s'arrête. dis le moi."
     
    mes sanglots s'échappent d'un seul coup.....  
    "oui Monsieur."
     
    immédiatement, la pression sur mon ventre tendu cesse de s'amplifier.  
    la douleur est telle que mes mots sont hachés, bousculés, pressés: "pardon Monsieur. pardon de vous avoir menti. pardon de ne pas faire d'efforts."
     
    son index passe doucement sur ma joue, puis sur mes lèvres....
    "relève toi."
     
    je me relève avec peine, l'eau se promène en moi comme si je n'étais plus dans mon corps....
    la crainte m'envahit lorsque je le vois poser le plaid sur le capot encore chaud de la voiture....
     
    il m'aide à appuyer mon ventre sur la tôle, la chaleur décuple la douleur dans mon ventre, et j'ai du mal à rester appuyée....
     
    j'ai un mouvement pour me relever, il comprend bien que je n'arriverai plus à rester immobile par moi-même, maintenant.
    Il noue les liens autour de mes poignets, et en fixe l'extrémité dans les portières, qu'il claque sur la corde.  
     
    les liens se tendent, je me laisse aller, grâce à eux.
     
    au premier coup, je reconnais le martinet.... mais.... ça n'est pas comme d'habitude.... on dirait que.... c'est bête à dire mais.... on dirait que mon Maître retient les coups.
     
    le martinet danse longuement sur mes fesses tendues, maltraitant au passage le plug....
     
    au bout d'une dizaine de coups, malgré la douceur de la sanction, je ne peux m'empêcher de pousser un petit cri de douleur, chaque fois que les lanières claquent sur ma peau..... petit cri qui résonne dans les champs autour de nous....  
     
    lorsqu'il me détache enfin, je serre fort les poings, alors qu'il retire le plug....
    par pudeur, il s'éloigne sans un mot lorsque je me dissimule derrière la voiture, et me vide. il me semble que cela ne va jamais s'arrêter, de longues giclées violentes s'échappent de mon corps, j'ai du mal à me tenir accroupie. Chaque fois que je crois être totalement libérée, un nouveau spasme de douleur m'agite, et une nouvelle onde s'échappe de mon corps....  
    lorsqu'il me semble être redevenue normale, je me relève avec peine, mais l'épuisement me fait tomber à genoux, à peine quelques mètres plus loin.  
     
    Mon Maître s'approche de moi, caresse doucement ma nuque, et, sans un mot, glisse ses doigts dans mes cheveux, je comprends, je me tends et il s'enfonce en moi.....  
    mon anus est si dilaté par la sanction, et si douloureux, que chacun de ses va et viens en moi me fait sangloter de douleur.... pourtant.... j'ai envie qu'il continue, j'ai envie qu'il jouisse encore et encore en moi, je lui donnerai toutes les forces qui me restent, je lui donnerai tout ce que je suis capable de lui donner. j'ai l'impression qu'il peut m'en demander autant qu'il veut, je resterai malgré tout sienne, sans concession.  
    juste avant de jouir, il se retire, et s'enfonce à nouveau complètement en moi, mais dans mon intimité.... il se défoule sans se retenir, comme un jeune chien heureux de vivre en moi, et je gémis, non plus de douleur, mais de plaisir lorsque je reçois sa jouissance au creux de mon ventre....
     
    lorsqu'il se retire, je m'effondre sur l'herbe jaune, et pleure d'épuisement....
    il me laisse quelques secondes, reprenant son souffle, debout à côté de mon corps sans forces. puis il s'accroupit à côté de moi, me soulève doucement, entoure le plaid autour de mon corps nu, et se dirige vers l'autre bout du champ. je ferme les yeux, serre mes bras autour de lui, et m'en remets à lui.
     
    lorsqu'il s'assoit sur l'arbre mort, tombé à terre, et dépose mon corps à côté de lui, j'utilise , comme un réflexe, mes dernières forces, pour m'agenouiller tout contre lui.
     
    il passe ses bras sous les miens, me soulève doucement, (je me sens "précieuse" quand il me manipule ainsi, précieuse pour lui), et appuie mon dos contre lui. ses doigts s'attardent sur mes seins....
     
    il serre ses bras autour de mon corps. aussitôt, sa chaleur m'envahit, et me procure un sentiment immédiat de bien-être.
     
    je relève les yeux devant moi, et comprends enfin pourquoi il m'a portée jusqu'à l'extrémité du champ.  
     
    sur le Mont Ventoux, juste en face de nous, de l'autre côté de l'immense plaine agricole, et au delà encore de tous les villages, le soleil est en train d'offrir ses premiers rayons, rougeâtres, orangées, brillants, qui s'étalent sur les restes des brumes du matin, pleins d'une force dont je ne me savais pas capable. les premiers rayons tièdes du soleil caressent ma peau nue, au même rythme que le cœur de mon Maître qui bat, juste derrière moi...... et je souris.




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  • Lorsqu'il m'a dit: "j'ai un souci avec l'une des familles, on va les prendre ici un moment.", j'ai fait la moue.  
    il a cru que je craignais de perdre mon petit confort, et m'a méprisée. mais je ne craignais pas pour mon confort. j'ai vécu sans suffisamment longtemps. je craignais simplement de perdre notre intimité, notre "cocon", et également notre jeu, puisque, bien entendu, il nous serait impossible, tant que ces gens seraient ici, d'être ce que nous aimons tant être.
    j'ai donc pris la famille en question en grippe, avant même de les connaître, non pas parce que je ne voulais pas "partager", comme dit mon Maître, mais simplement parce qu'il m'avait méprisé, à cause d'eux.
     
    aujourd'hui, c'est le dernier jour où ils seront avec nous. paradoxalement, malgré le sentiment de haine que j'avais à leur égard, avant qu'ils n'arrivent, je me suis très vite attachée à eux. ils ont bousculé notre petit quotidien, c'est vrai, mais leur présence nous a surtout donné l'occasion d'avoir de grands fous rires à la maison, aussi beaux que ceux qu'on avait au tout début.  
    aujourd'hui, ils vont partir.... et notre "jeu" va recommencer.... paradoxalement, il ne m'a pas manqué, et je crois même que j'ai apprécié de faire une pause.  
     
    ils sont en train d'emballer leurs affaires, j'ai voulu les aider, mais les larmes me sont venues aux yeux. j'aurais aimé qu'ils restent encore un peu, à pimenter notre noir et blanc coutumier de leur accent et de leurs tissus multicolores....
     
    pour ne pas qu'ils voient à quel point leur départ me touche, sans que je comprenne moi-même pourquoi, je suis sortie. j'ai prétexté une course, mais je suis restée assise sur le petit muret, devant notre trottoir. je hais les départs.
     
    je fixe le gris de notre rue.... je me sens anxieuse, de ce premier soir sans eux....  comment des étrangers ont-ils pu me faire angoisser comme ça, de ma vie de tous les jours?
     
    "nina !"
     
    je relève le visage. c'est Patrick. une boule se serre dans ma gorge.
     
    "il est là ?"
     
    je fais non avec la tête. pour une fois, je ne mens pas.
    machinalement, je réfléchis à la façon dont je suis habillée.... un jean, et un tee shirt long.... et mes cheveux sont attachés. ouf.... ça va....  
     
    "putain...." il a l'air énervé....je voudrais tellement comprendre les "problèmes" qu'ils ont, pour ce travail.
     
    "chaque fois que je passe, il n'est pas là! tu te foutrais pas un peu de moi toi, par hasard ?"
     
    je ne réponds pas. ça ne sert à rien qu'il s'en prenne à moi. Moi, je n'y peux rien. comme il insiste, j'hausse les épaules...  
     
    "t'es sûr qu'il habite ici, au moins?"  
     
    quelque part, je suis bien contente qu'il enrage. c'est bien fait pour lui. enrage tant que tu veux, je te montrerai même pas que tu me fous la trouille, à t'énerver comme ça.  
     
    je prends un malin plaisir à faire mine de me désintéresser complètement de ce qu'il dit....
     
    "des fois oui, des fois non....."
     
    ça fait tellement du bien de faire un peu la peste avec cet homme là....
     
    "ça te fait sourire ou quoi?"
     
    mon sourire tombe, mais je me moque toujours de lui, intérieurement. la p'tite soumise en moi s'endort, et la femme est bien contente de prendre sa revanche. cet homme n'est pas mon Maître, je ne lui dois rien. s'il peut me toucher, c'est uniquement pour mon Maître.
     
    d'ailleurs, je vais me lever, lui tourner le dos, et faire comme s'il était déjà parti.
    je me dirige vers Notre porte, je suis fière et heureuse d'avoir gardé ma fierté, pour une fois, devant Patrick.
     
    je passe le portail, mais.... je pensais avoir gagné, pour une fois, contre lui.  
    je sens ses mains enserrer mes épaules, et me plaquer contre le mur, entre la fenêtre et la porte.... mon dos cogne durement contre le mur.... j'ai envie de crier, les gens , à l'intérieur de notre maison, me défendront.... mais.... non.... il ne feront rien.... Patrick et Raphaël leur donnent bien trop. je reste silencieuse.
     
    il n'y a rien, dans le regard de Patrick, de tout ce que j'ai pu trouver chez mon Maître. Ce vide de toutes ces qualités là me laisse glaciale, entre ses doigts.
     
    " tu vas voir petite salope, la prochaine fois que tu viendras déballer ton cul à la maison, je vais te faire morfler. t'as bien de la chance de pas être plus souvent à moi. t'as bien de la chance."
     
    je n'ai même pas essayé de me débattre. je n'ai même pas essayé de me défendre. je l'ai laissée me secouer comme un pantin, sans rien dire. je ne peux pas prendre l'excuse de mon Maître, puisqu'il n'était pas là.
     
    Patrick m'a lâchée, et s'est éloigné. je me suis laissée glisser contre Notre mur, accroupie sur le sol. je n'ai même pas pleuré. j'ai même oublié de respirer. je hais cet homme.
     
    j'ai mis de longues minutes avant d'arriver à me reprendre.  
    mes jambes tremblent si fort sous moi que la simple traversée de la cuisine me paraît difficile. ma tête me tourne....
     
     
     
    Nadia est en train de peindre des motifs sur ses mains, avec le henné.... c'est magnifique... il paraît que ça lui permet de fêter quelque chose....
    elle s'aperçoit que je la regarde... et me sourit.
     
    "tu vas mieux?"
     
    je ne comprends pas.
    "pourquoi?"
     
    "tu es tombée par terre, tout à l'heure. on t'a ramassée, et tu as dit des mots qui ne veulent rien dire. "
     
    elle me regarde longuement.... qu'est ce que j'ai bien pu dire?
     
    elle me sourit , et dans un petit rire, murmure: "tu nous as fait peur."  
     
    les paroles de Patrick me reviennent en mémoire. je baisse les yeux.... je contemple les mains de Nadia, qui sont magnifiques. les formes du henné sont complexes, et fines.
     
    sans un mot, Nadia me sourit, et prend mes mains entre les siennes. le petit pinceau danse sur ma peau....
     
    "c'est pour te remercier."
     
    "me remercier de quoi Nadia?"
     
    "d'avoir partagé ta maison avec nous, de nous avoir fait rire avec les ombres chinoises, et de nous avoir fait du...."
     
    elle a encore oublié le nom !
     
    je murmure : "taboulé". ....et elle rit.... ce mot la fait rire.... moi aussi, quand j'étais plus jeune, et que je découvrais tous les drôles de mots d'ici, je riais. la joie de vivre de Nadia me rend le sourire, même si je sais que , dans quelques heures à peine, elle et les siens seront repartis, déjà.
     
    je fixe ses doigts agiles, qui complexifient encore et encore les marques au henné sur mes poignets, la paume de mes mains, et la base de mes doigts.
     
    "et voilà! fini! t'es une princesse maintenant! "
     
    je ne sais pas pourquoi, ce serait avec quelqu'un d'autre, sûrement que je me serais sentie stupide, de rire si facilement, mais avec Nadia, pendant ces quelques jours, nos fous rires n'ont presque pas eu de raison, et nos sourires non plus. sa présence de femme, sous notre toit, m'a redonné des forces, du courage, et de l'envie de rire.
     
     
    le soir est venu plus vite que jamais. Raphaël est rentré....  
     
    "tout est prêt? tout est emballé? allez allez allez les gosses, dépêchez vous! oui, j'ai la camionnette. oui. ne vous inquiétez pas . allez! vite! "
     
    je fais un pas pour suivre ces gens, je veux leur dire au revoir jusqu'à la fin..... mais....
    "non nina. toi tu restes. y'a plus de place . m'attends pas avant deux heures."  
    un baiser sur mon front, il murmure "sois sage." contre mon oreille.....
     
    les deux heures sont longues.... Nadia avait préparé le repas pour nous, elle a laissé un petit mot sur le tuperware , que je lis et relis plusieurs fois..... je n'ai rien à faire, et rien envie de faire..... je repense à Patrick, et je me sens vide.
    je contemple encore et encore les dessins sur mes mains.
     
    lorsque la porte s'ouvre, Raphaël a l'air soulagé. je comprends que tout s'est bien passé.
     
    la soirée se passe paisiblement... le jeu reprend, tout doucement. lorsque la nuit tombe, je me glisse aux pieds de mon Maître..... je caresse son sexe du bout de mes doigts....
     
    "c'est quoi, ça?"
     
    sa voix se fait dure.
     
    il prend mes doigts entre les siens.
     
    je murmure "c'est Nadia qui me les a dessinés, c'est pour...." mais je n'ai pas le temps de finir ma phrase.
     
    "j'aime pas. va te nettoyer."
     
    je secoue la tête "ça ne part pas comme ça, ça partira au fur et à mesure des jours."
     
    "t'as qu'à frotter." il a l'air énervé, je ne comprends pas.....
     
    "mais moi je les aime bien, ces formes."
     
    "moi pas. ça fait racaille."
     
    je baisse les yeux.  
     
    "d'abord, qui t'a autorisé à faire ça? est ce que je t'ai dit , moi, d'aller te dessiner des conneries sur la peau?"
     
    je sens une sourde révolte gronder en moi..... une révolte que je n'ai jamais ressenti avant, surtout pas envers mon Maître.... je sais bien qu'il cherche simplement un prétexte pour relancer le jeu.... peut-être même qu'il se moque complètement de ces formes sur mes mains.... mais.... j'ai envie de lui crier dessus.... les larmes me viennent aux yeux....
    j'hausse le ton avant même d'avoir eu le temps d'y penser, et les mots sortent de moi comme incontrôlés.
     
    "pourquoi ça ferait pas racaille sur eux, et que ça le ferait sur moi? pourquoi tu es si..... obtus ! pourquoi Raphaël ?"
     
    ce ton là, il ne peut pas le tolérer, et je le sais bien. la gifle à laquelle je m'attendais tombe sur mon visage. un autre soir, je l'aurais acceptée. un autre soir, j'aurais tout accepté.
    mais j'ai commencé à m'énerver, et ça ne retombe pas.
     
    lorsqu'il essaie de me retenir à genoux sur le sol, je ne me laisse pas faire..... après tout, puisque j'ai commencé à crier, qu'importe que j'aggrave un petit peu mon cas.  
     
    je me lève devant lui, je me sens minuscule, mais il faudra bien pourtant que je lui parle comme si je ne l'étais pas.
     
    "j'ai pas envie de frotter pour les enlever. j'ai pas envie !!!!!" je marque un temps d'arrêt.... il me regarde, sans dire un mot. son calme m'énerve.....
     
    les mots sortent avant même que j'ai pu les retenir.....
     
    "d'ailleurs, j'ai pas envie..... je veux plus..... Patrick ! "
     
    il paraît surpris..... c'est vrai que Patrick n'a rien à voir avec les dessins sur ma peau, mais..... je crois que si je n'arrive pas à lui obéir sans lui en vouloir, ce soir, c'est à cause de Patrick. à la limite, je m'en moque des dessins..... mais j'ai la haine au fond du ventre.... envers Patrick.... et même envers mon Maître.
     
    il baisse les yeux, l'air déçu.  
    j'aurais dû me taire. mais il fallait que ça sorte.  
    j'ai tellement honte..... d'avoir joué à la "salope parfaite", de ne jamais avoir rien dit contre tout ça, d'en avoir même redemandé, et, ce soir, de lui re jeter ça à la figure.....  
     
    je ne peux pas rester dans la même pièce que lui.  
     
    la nuit est déjà tombée, dehors, pourtant je claque la porte, et m'éloigne.....
     
    jamais je n'ai parlé comme ça à mon Maître. d'ailleurs, nous nous sommes si rarement disputés. je m'en veux à en crever.... j'ai bien du marcher trois kilomètres, j'ai arpenté les rues sombres du vieux centre, sans même regarder où j'allais, l'esprit vide.... il doit tellement m'en vouloir.....
     
    lorsque je me décide enfin à rentrer, il n'a pas refermé la porte à clef derrière moi.
    j'ouvre, et, sans réfléchir, je me laisse glisser à ses pieds.....
    il me laisse sur le sol, et s'éloigne....
     
    au moment où il se couche, je ne demande pas à venir à ses côtés. je vais de moi-même à ma place, au pied du lit. je ne dors pas de la nuit. je l'écoute respirer..... si seulement je m'étais tue.....
     
    c'est lui qui me réveille sur le bord du matin.... j'avais fini par m'endormir....
     
    c'est une journée où ni lui ni moi ne travaillons. elle aurait pu être si belle, si seulement je n'avais rien dit.
     
     
    "alors..... tu ne prends pas de plaisir, quand il y a Patrick?"
     
    je reste muette.... ma colère est passée, et je ne sais pas quoi lui répondre.....  
     
    si.... il faut bien que j'avoue que si....
     
    je murmure: "j'en prends parce que je te donne encore plus. parce que tu es fier de moi."
     
    "et?"
     
    "et c'est tout."
     
    "bien..... pourquoi tu ne l'as pas dit avant ?"
     
    "je ne sais pas."
     
    le silence m'oppresse. j'ai besoin de me justifier.... besoin qu'il comprenne....
     
    "Patrick n'est pas comme toi, tu sais."
     
    "qu'est ce que tu racontes ?"
     
    "quand il me touche..... il n'y a aucun respect..... aucune affection.... il n'y a rien de tout ce que tu as. comment pourrais-je éprouver du plaisir avec un homme comme lui?"
     
    Raphaël ne répond pas..... je sens bien que je lui en veux, encore un petit peu.
     
    "comment tu peux penser que je peux en avoir? "
     
    Le silence de mon Maître est interminable..... jamais, avant ce matin, je ne lui avais fait le moindre reproche.....  
     
    il me prend contre lui, et me serre longuement entre ses bras....  
     
    "alors, on gardera Patrick pour les grosses sanctions . uniquement pour les sanctions."
     
    je réfléchis un instant..... oui.... ça me paraît raisonnable.... maintenant qu'il Sait que je ne prends de plaisir à ce qu'il me "prête" à cet homme, s'il me prête à lui, ce sera une sanction. simplement une sanction. et alors, ce sera la soumise en moi, qui rendra fier son Maître, et non plus la "salope" qui fera semblant d'aimer ça....
     
    je lui souris.... "d'accord."
     
    il prend un air faussement fâché. j'aime quand son visage rit, de cette manière là.
     
    je me corrige rapidement: "bien Monsieur."
     
    "j' aime mieux ça." il passe une main dans mes cheveux.... et saisit mes doigts entre les siens....  
     
    "obtus, hein?"
     
    je baisse les yeux..... sur les dessins sur ma peau..... obtus...... mon Maître adoré.... mais quelle idiote je fais.... je lui souris.
     
    maintenant que les autres sont repartis, je peux redevenir celle que j'aime tant être.... le plaisir reviendra aussi vite qu'il était parti. en fait, il suffisait d'une seule minute dans mon rôle, pour que je recommence à l'apprécier. il n'y avait pas de quoi angoisser.
     
    enfin, alors que je n'y croyais plus, il glisse, comme pour toutes les journées qui sont "à nous" mon collier autour de mon cou....
     
    un large sourire éclaire mon visage.... j'y crois à peine.... j'entoure mes bras autour de lui, et ne peux m'empêcher de pleurer doucement, de soulagement.
     
     
    je le fixe dans les yeux, et répète, tout doucement: "obtus."
     
    un baiser sur mes lèvres..... et deux petits mots..... : "tu Montes."
     
    je monte les escaliers.... vers notre pièce.... notre monde.... vers sa lumière....
     
    encore, et Encore......


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